BATTEMENT D’ELLE

PARTIE 1 : RENCONTRE INATTENDUE

Elle attendait devant l’ascenseur. A côté d’elle, la nouvelle armoire à glace qu’on lui avait collé depuis la veille, à sa descente de l’avion. Depuis, il n’avait pas dit un seul mot, malgré qu’elle ait essayé d’engager la conversation dans la voiture en sortant de l’aéroport Charles de Gaulle. Il s’était contenté de vérifier que son appartement était sécurisé, à deux heures du matin, avant de partir, elle n’aurait pas su dire où. Il était revenu la chercher, il y a quelques minutes à peine, dans le dix-huitième pour la conduire dans le seizième arrondissement de Paris.

Et alors qu’elle se tenait devant l’ascenseur, elle se demandait s’il était bien fait de chair et d’os et s’il avait un coeur qui battait sous sa chemise blanche, impeccablement repassée.

La veille, elle avait quitté New-York pour Paris, à contre coeur. Elle aimait être sur le sol américain et surtout dans cette ville si hétéroclite. Là-bas, elle pouvait être elle-même, se balader dans les rues, se mêler à la masse des gens inconnus et passer inaperçue. En France, sa vie était tout autre. Elle passait son temps à essayer de se cacher, à fuir et prier pour que personne ne la reconnaisse dans les rues. Elle avait peur qu’on l’interpelle, qu’on lui parle de ce passé qu’elle ressentait désormais d’un autre temps.

L’ascenseur arriva enfin au rez-de-chaussée et le garde du corps se plaça devant les portes pour les maintenir ouvertes. Elle rentra dans la cage de fer vide et appuya sur le cadran numérique.

L’heure matinale, qui lui avait été donnée pour ce rendez-vous, n’était pas due au hasard. Les bureaux de la tour de verre semblaient vides. Pourtant, alors que les portes allaient se refermer, une main les reteint. Un jeune homme entra et appuya à son tour sur le cadran. Sans la regarder, il lui lança un « bonjour », auquel elle répondit poliment. Le garde du corps se contenta de hocher la tête en se rapprochant d’elle.

Les yeux rivés sur son téléphone portable, il ne leva son visage qu’au moment où les portes s’ouvrirent. Il vérifia qu’il était au bon étage et sortit. Alors que les portes se refermaient, il se retourna vers elle et lança « bonne journée ».

C’est à ce moment-là qu’il croisa son regard et le planta dans le sien. Sa bouche s’ouvrit comme s’il allait parler. Mais les portes se refermèrent, interrompant leur contact visuel.

L’ascenseur s’éleva de nouveau, l’amenant un étage plus haut. Elle sortit sur le palier.

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